Pour explorer le site et accéder à certains contenus, créez votre compte dès maintenant: c'est simple et gratuit !
Item 288 - Cancer : cancérogénèse, oncogénétique.
Résumé
Objectifs CNCI | |
---|---|
| |
Recommandations | |
| |
Mots-clés | A savoir |
|
|
Cancérogénèse
Histoire naturelle du cancer
- Cancer
- Définition: multiplication de cellules qui
- échappent aux mécanismes régulant l’homéostasie tissulaire (prolifération, survie et différenciation cellulaire)
- et acquièrent les capacités d’envahir les tissus avoisinants (envahissement loco-régional) et à distance (métastases)
- Dvpt du cancer se déroule sur une période de temps qui peut être longue (plusieurs années à plusieurs dizaines d'années)
- Dvlpt et évolution clinique très variables: très agressive ou indolente, selon
- Organe d'origine
- Type histologique
- Caractéristiques phénotypiques
- Ne pas confondre
- Pathologie prédisposante
- Pathologie associée à un risque accru de développer une lésion cancéreuse (endobrachyoesophage, pathologie inflammatoire telle que maladie inflammatoire chronique intestinale, hémochromatose...)
- Lésion pré-cancéreuse
- Lésion histologique associée à un risque élevé de survenue de cancer (hyperplasie atypique, dysplasie, polype adénomateux colorectal...)
Etapes de la carcinogénèse
- Initiation tumorale
- Lésion initiale de l'ADN, rapide, irréversible et transmissible
- Lésion induite par un facteur carcinogène
- Physique: UV, radiations ionisantes
- Chimique: hydrocarbures aromatiques, métaux lourds, amines aromatiques
- Viral: HBV, HPV, EBV
- Promotion
- Exposition prolongée, répétée ou continue à une substance qui entretient et stabilise la lésion initiée (stimulus mitogènes: cytokines, hormones..)
- Aboutit à l'expansion clonale des cellules pré-tumorales
- Progression
- Acquisition des capacités de prolifération/survie cellulaire, résistance à l'apoptose (mort cellulaire programmée)
- Acquisition des capacités d'immortalisation, d’invasion locale, de dissémination à distance (métastase ++)
Etapes d'évolution d'un cancer d'origine épithélial
- Dysplasie
- Anomalies de la prolifération et de la différenciation cellulaire, secondaire à:
- Etat inflammatoire chronique (gastrite, RGO)
- Infection virale (HPV)
- Exposition à des substances carcinogènes (tabac)
- Mise en évidence par des anomalies architecturales tissulaires et des anomalies cytologiques (mitoses, anomalies nucléaires..)
- Définie par sa sévérité
- Bas grade
- Haut grade (dysplasie ou néoplasie intra-épithélial sévere) = carcinome in situ
- Évolutions possibles: régression, stabilité, évolution vers un carcinome invasif
- Carcinome in situ
- Anomalies de la prolifération et de la différenciation cellulaire associées à des anomalies d'organisation des cellules entre elles
- ⚠ Pas de franchissement de la membrane basale
- Parfois multifocal (cancérogénèse de champ)
- Évolutions possibles: régression, stabilité, évolution vers un carcinome invasif
- Carcinome invasif
- Franchissement de la membrane basale et envahissement du tissu conjonctif sous-jacent
- Croissance tumorale nécessite une néo-angiogenèse
- Comporte un composant stromal (vasculaire, mésenchymateux, immunitaire)
Dissémination des cellules tumorales
- Invasion loco-régionale
- Invasion des tissus adjacents par contiguïté
- Invasion des vaisseaux sanguins et lymphatique
- Envahissement des gaines nerveuses
- Dissémination, formation de métastases
- Par voie lymphatique:
- D'abord a/n du ganglion sentinelle: 1er relais ganglionnaire drainant la tumeur
- Puis en aval de la chaine
- Par voie sanguine: localisation préférentielle des métastases en fonction du drainage veineux porte ou cave
- Par voie intra-canalaire (voies excrétrices urinaires)
- Par voie intra-cavitaire (péritoine, plèvre, méninges)
Biologie des cellules cancéreuses et définitions
- Principales caractéristiques des cellules cancéreuses
- Auto-suffisance en signaux de prolifération (mutations des proto-oncogènes et gain de fonction)
- Insensibilité aux signaux inhibant la croissance cellulaire (mutations des gène suppresseurs de tumeurs et perte de fonction)
- Echappement à l’apoptose
- Capacité réplicative illimitée = immortalisation
- Cellule capable de proliférer in vitro indéfiniment, du fait de l’absence de sénescence réplicative
- Implication des télomères et télomérases
- Capacité d’induire une néo-angiogenèse (VEGF/VEGFR)
- Propriétés d’invasion tissulaire locale, de formation de métastases à distance
- Métabolisme énergétique spécifique
- Capacité d’échapper à la réponse immunitaire anti-tumorale (PD-1/PDL-1)
- Transformation cellulaire
- Cellule immortalisée ayant perdu l’inhibition de contact, capable de proliférer sans ancrage et de former des tumeurs chez la souris immunodéficiente
- Cellules souches tumorales
- En faible nombre, capablent de donner naissance à une tumeur
- Propriétés
- Auto-renouvellement
- Quiescence
- Multipotence (différenciation vers différents linéages cellulaires)
- Multiplication, diifférenciation
- Initiation tumorale
- Serait à l’origine de résistance aux traitements, rechutes tumorales et diffusion métastatiques
- Transition épithélio-mésenchymateuse (EMT)
- Etat transitoire des cellules épithéliales cancéreuses
- Les cellules perdent les caractéristiques épithéliales et acquièrent des caractéristiques phénotypiques de cellules mésenchymateuses
- Cellules mobiles ++ → propices au développement de métastases
Hétérogénéité tumorale
- Définition
- Variations spatio-temporelles du génome tumoral
- Secondaire aux divisons cellulaires dans la tumeur primitive et dans les différentes localisations tumorales
- Donnent naissance à des sous-clones génétiquement hétérogènes
- +/- marquée selon le type de cancer
Oncogénétique
Généralités
- Proto-oncongènes: gène normal non activé
- Codent des protéines impliquées dans les signaux de prolifération et de survie cellulaire (facteurs de croissance et leur récepteurs, facteurs de transcription)
- Souvent homologues de gènes transformants d'origine virale (v-onc)
- Activation proto-oncogènes → oncogènes
- Forme activé d'un gène, favorisant le processus oncogénique par un gain de fonction
- Activation quantitative (surexpression due à une amplification, translocation..)
- Activation qualitative (mutation faux-sens, micro-délétion..)
- 1 allèle activé suffit → phénotype dominant
- Il peut être cédé par un génome viral ayant infecté la cellule
- Gène suppresseur de tumeur
- Forme inactivé d'un gène, favorise le processus oncogénique par une perte de fonction
- Par délétion totale ou partielle
- Par méthylation du promoteur du gène
- Par mutation (non-sens, décalage cadre de lecture)
- Inactivation bi-allélique (hypothèse "two hits" de Knudson) → phénotype récessif
- Mécanisme de la plupart des sd de prédisposition génétique: un allèle est inactivé au niveau germinal, la 2ème dans les cellules tumorales
- Ex: TP53, PTEN, RB1, APC
Oncogénétique constitutionnelle
- Définition
- Altérations génétiques héréditaires "germinales", pouvant être mises en évidence dans les cellules normales de l'individu
- Epidémiologie
- Agrégation familiale de cas de cancers dans 10 à 20 % des cancers → formes familiales
- 5-10% formes familiales sont dues à la présence d'une mutation germinale, qui ↗ ++ le risque de cancer au cours de la vie
- Plus fréquent si diagnostic de K < 40 ans
- Par opposition à l'oncogénétique somatique
- Anomalies génétiques acquises au niveau des cellules somatiques, accumulées au cours des divisions cellulaires
- Ces mutations ont 3 intérêts
- Diagnostique: pour préciser un type histologique (sarcomes, lymphomes, gliomes)
- Pronostique
- Théranostique: prédire la réponse à un TTT
Syndrome de prédisposition génétique aux cancers seins/ovaire
- Epidémiologie
- 5 à 10 % des cancers du sein surviennent dans le contexte d’un syndrome de prédisposition génétique
- Transmission AD
- 1 inactivation constitutionnelle + 1 mutation a/n tumoral
- Mutations présentes à une fréquence de 1/500 individus en moyenne dans la population
- Mutations des gènes codant des protéines impliquées dans la réparation des cassures double brin de l'ADN par recombinaison homologue
- BRCA1 (chromosome 17)
- BRCA2 (chromosome 13)
- Augmentation du risque de développer (< 70 % de risque cumulé sur la vie);
- Cancer du sein (à un âge précoce et/ou multifocal)
- 2ème cancer sur le sein controlatéral
- Cancer de l’ovaire (++ après 40 ans)
- Pour BRCA2:
- Cancer du sein et de la prostate chez ♂
- Cancer du pancréas et mélanome
- Eléments permettant de suspecter un syndrome de prédisposition K du sein et de l'ovaire
- Plusieurs cas K sein au sein d'une même famille, de la même branche (paternelle ou maternelle)
- Précocité de survenue K sein (40 ans ou moins)
- Diagnostic second K sur le controlatéral et/ou multifocal
- Précence d'un K ovaire
- K sein chez ♂
- Score d'Eisinger
- Score familial d'analyse de l'arbre généalogique dans une seule branche parentale, basé sur
- L'âge de diagnostic
- Présence K sein chez ♂
- Présence K ovaire
- Permet de graduer le risque de prédisposition génétique et guide l'indication d'une cs d'oncogénétique
- Diagnostic de syndrome BRCA → surveillance clinique et radiologique spécifique
- Examen clinique bisannuel des seins dès l’âge de 20 ans par un médecin référent
- Imagerie mammaire annuelle dès l’âge de 30 ans
- IRM (jusqu’à l’âge de 65 ans)
- Mammographie numérisée plein champ, incidence unique oblique externe
- ± échographie
- Surveillance gynécologique annuelle dès l’âge de 35 ans
- Annexectomie bilatérale, à titre préventif
- Dès 40-41 ans pour BRCA1
- Dès 45-47 ans pour BRCA2
- Implication thérapeutique de la connaissance du statut génétique BRCA
- Mutation BRCA = prescription de traitement anti-PARP dans K sein, ovaire, prostate, pancréas
- → consultation d’oncogénétique chez toutes les patientes présentant un cancer de l’ovaire avant 70 ans
Syndrome de prédisposition aux cancers colorectaux (5% des CCR)
- Syndrome de Lynch
- Mutation germinale d’un des gènes impliqués dans la reconnaissance et la réparation des mésappariements de l’ADN (Mismatch Repair ou MMR): MLH1, MSH2, MSH6, PMS2
- Transmission AD
- Inactivation bi-allélique du gène MMR → instabilité des séquences microsatellites (phénotype MSI ou dMMR), mis en évidence:
- Par test de biologie moléculaire: accumulation d'erreurs de réplication sur séquences microsattelites
- Par immunohistochimie: perte d'expression de la protéine issu du gène muté
- ↗ ++ risque de développer
- K colorectal (risque cumulé 25 à 50%)
- K endomètre (risque cumulé 30 et40 %)
- K des voies excrétrices urinaires
- K intestin grêle (spectre étroit, risque élevé pour ces 4 derniers)
- Rarement: K estomac, voies biliaires, ovaires (spectre large, risque modéré)
- ⚠ Phénotype tumoral MSI ou dMMR NON spécifique du syndrome de Lynch
- L'inactivation MMR dans les K peut provenir d’une inactivation somatique (par hyperméthylation du promoteur du gène MLH1)
- Phénotype MSI → forte sensibilité tumorale à l'immunothérapie anti-tumorale (anti-PD1)
- Eléments permettant de suspecter un syndrome de Lynch
- K colorectal < 60 ans
- Cancers multiples (synchrones ou métachrones) du spectre du sd de Lynch chez un même patient
- Cancer colorectal + antécédents familiaux de cancer(s) du spectre du sd de Lynch
- Un apparenté au 1er degré <50 ans
- Ou 2 apparentés, au 1er ou 2nd degré, quels que soient les âges
- Surveillance
- Coloscopie avec coloration (chromoscopie) à l’indigo-carmin
- Tous les 2 ans dès l’âge de 20-25 ans
- ⚠ Pas de colectomie prophylactique systématique
- Gastroscopie
- Si antcd familiale de K gastrique tous les 2 ans
- En l'abs d'antcd tous les 4-5 ans
- Echographie endo-vaginale anuelle, dès l’âge de 30-35 ans, avec prélèvement endométrial préconisé
- Polypose adénomateuse familiale (PAF)
- Mutation germinale du gène APC, plus rare que Lynch
- Transmission AD
- Développement multiples polypes adénomateux colorectaux (> 100 dans la forme classique)
- Dès un âge jeune (souvent enfance, adolescence)
- Risque de développer un K avant 40 ans ++
- Risque moins fréquent d'adénomes duodénaux à risque de dégénérescence
- Surveillance
- Coloscopie annuelle à partir de la puberté
- Duodénoscopie avec biopsie de la papille tous les ans à tous les 2 ans
- Colectomie (voire colo-proctectomie) prophylactique dès l’âge de 18-20 ans
Consultation d'oncogénétique
- Indications
- Suspicion de forme familiale
- Suspicion de syndrome génétique de prédisposition
- Modalités
- Encadrée par les lois de Bioéthique ++
- Après recueil du consentement signé
- Sous réserve que le patient accepte au préalable d'informer sa parentèle en cas de mutation identifiée
- Précisions
- Test généralement réalisé sur l’ADN isolé des cellules normales, sur leucocytes circulants (ADN germinal)
- Prélèvement de contrôle obligatoire par un frottis jugal ou un prélèvement salivaire (tube spécifique)
- Si dentification de la mutation germinale chez le cas index
- Permet de proposer aux apparentés asymptomatiques un « test prédictif » afin de déterminer s’ils sont porteurs de cette caractéristique génétique
- Puis suivi individuel adapté aux risques
- Si forme familiale avérée et en absence de « mutation » identifiée chez le cas index
- Aucun test prédictif n’est disponible
- Surveillance clinique / radiologique appropriée, proposée à l’ensemble des individus selon recos HAS
Génétique moléculaire des cancers
- Deux types de mutations
- Conductrices "driver" (= pilotes, motrices)
- En faible nombre (5-10)
- Joue un rôle dans le dvlpt du K
- Touchent proto-oncogènes et gènes suppreseurs de tumeurs
- Passagères "passenger" (= accompagnatrices)
- Les plus fréquentes ++
- Reflet de l'exposition aux substances carcinogènes/instabilité génétique
- Pas de rôle dans le dvpt du K
- Principales anomalies génétiques
- Amplification génique
- Augmentation du nombre de copies d’un gène, pouvant conduire à sa surexpression
- Détection
- Biologie moléculaire (hybridation sur puce, PCR quantitative, séquençage nouvelle génération - NGS...)
- Cytogénétique moléculaire (hybridation in situ avec des sondes fluorescentes ou chromogéniques, sur noyau interphasique ou métaphasique ; - FISH, SISH, CISH..)
- Immunohistochimie
- Délétion génique
- Perte de 1 ou des 2 copies d’un gène
- Détection
- Biologie moléculaire (hybridation sur puce, PCR quantitative, séquençage nouvelle génération - NGS...)
- Cytogénétique moléculaire (hybridation in situ avec des sondes fluorescentes ou chromogéniques, sur noyau interphasique ou métaphasique)
- Immunohistochimie
- Translocation / réarrangement chromosomique
- Fusion de deux segments de chromosomes normalement non contigus, originaire du même chromosome ou de deux chromosomes différents
- Aboutit à la surexpression de certaines protéines (translocation impliquant les gènes des Ig ou des TCR, par ex)
- Et/ou à la production de protéines de fusion chimériques (protéine oncogénique BCR-ABL dans le cas de la translocation t(9;22) caractéristique des LMC par ex)
- Détection
- Biologie moléculaire (RT-PCR quantitative...)
- Cytogénétique moléculaire (HIS avec des sondes fluorescentes)
- Immunohistochimie
- Mutations
- Modification de la séquence nucléotidique, concernant un seul nucléotide ou un nombre limité de nucléotides
- Mutation synonyme: pas de modification protéique
- Mutation faux sens: changement de la séquence protéique
- Mutation non sens: production d’une protéine tronquée → gain de fonction (mutation activatrice) ou perte de fonction (mutation inactivatrice)
- Détection
- Biologie moléculaire (séquençage, différentes techniques de PCR...)
- Immunohistochimie
- Méthylation
- Anomalies de la méthylation de l'ADN → anomalies de régulation transcriptionelle (par ex, méthylation régions promotrices de gènes suppresseurs de tumeurs)